La situation est toujours préoccupante dans le territoire de Kwamouth, province du Mai-Ndombe. Les affrontements intercommunautaires opposent Yaka et Teke. Ce conflit a déjà fait plus de 150 morts au territoire de Kwamouth, en plus des arrestations des présumés auteurs. À côté des personnes interpellées, des fusils, des flèches et des machettes dont ils se servent. Les assaillants égorgent sans pitié toute personne qui tombe entre leurs mains. Le Chef coutumier de Fadiaka, son épouse et certains de leurs enfants ont été déjà tués. Les militaires sont aussi visés par ces assaillants. Des maisons et plantations ont été brûlées. Ces violences ont provoqué près de 20 milles déplacés dont 300 enfants non accompagnés. Ces violences entre les deux communautés ont déjà atteint le territoire de Bagata (Kwilu).
Cette situation sécuritaire et humanitaire sombre et alarmante vécue dans le Maï-Ndombe préoccupe plusieurs congolais épris de la paix et du bien-être social. Nomberux, en plus de se sentir préoccuper, avancent certaines propositions pour y remédier tant soit peu.
C’est le cas du député provincial du Nord-Kivu, Honorable Bertrand Ngwali qui, par jurisprudence, propose au Président de la République de décréter aussi le régime de l’administration militaire dans la province du Maï-Ndombe pour espérer résoudre les violences intercommunautaires à Kwamouth. Pour lui, « autant que le président de la République avait jugé approprié et efficace l’état de siège pour éradiquer les conflits armés en provinces du Nord-Kivu et en Ituri, Est de la République Démocratique du Congo, autant qu’il en fasse pour ce qui est du Maï-Ndombe. » L’élu provincial du territoire de Beni estime que « ne pas recourir à ce que lui avait pensé être la meilleure solution pour pacifier le Nord-Kivu et l’Ituri, en ce qui est des conflits armés à Kwamouth entre Téké et Yaka, le chef de l’État aura témoigné une politique de deux poids et deux mesures ; les situations entre l’Est et le Maï-Ndombe étant presque similaires ». Ce qui pourra certainement, d’après lui, « renvoyer à plusieurs spéculations multiples ».
En rappel, le territoire de Kwamouth, en province de Maï- Ndombe, enregistre des violents affrontements entre les communautés Téké et Yaka depuis le début du deuxième semestre 2022.
Des personnes armées se réclamant membres de ces tribus s’attaquent mutuellement à cause d’un conflit foncier de longue date.
Des témoins oculaires affirmaient que des jeunes avaiet barricadé certains axes routiers du territoire avec des check-points, à la recherche des membres de la tribu adverse.
Qui sont les principaux protagonistes ?
Les Téké sont établis sur les plateaux de sable qui s’étendent sur les deux rives du fleuve Congo depuis des décennies.
Ils ont réussi à mettre en place un système de gouvernance qui a ensuite été adopté par d’autres groupes.
Quant aux Yaka, aussi appelés Bayaka, ils sont arrivés sur les lieux peu après les Tékés.
Ce peuple d’agriculteurs cultive du manioc, de l’arachide, des ignames, etc. Il pratique aussi l’élevage de la volaille et du petit bétail. Cependant, pour pouvoir exploiter les terres appartenant aux Téké, les Yaka doivent payer une redevance aux chefs coutumiers Tékés. C’est un arrangement qui a permis aux deux communautés de cohabiter pacifiquement pendant des années.
Pourquoi les deux communautés s’affrontent-elles ?
C’est parce-que certains membres de la communauté Téké accusent les Yaka de refuser de payer la redevance coutumière depuis quelques temps.
L’histoire très récente rappelle encore qu’en fin 2018, plus de 530 personnes ont été tuées dans des violences intercommunautaires à Yumbi, un peu plus au Nord de Kwamouth. Ces affrontements intercommunautaires précédaient la période électorale.
Plusieurs analystes posent la question de l’implication politique ou financière sur ces évènements meurtriers. Ils s’interrogent aussi sur le but poursuivi.
État de siège comme meilleure solution du chef de l’État congolais pour combattre les conflits armés
Le 6 mai 2021, le président congolais Félix Tshisekedi déclare l’état de siège dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu. Le but : restaurer la paix, alors que ces provinces subissent les attaques de groupes armés. Début 2021, 122 groupes armés sévissent dans la région. En mettant en place l’état de siège, le président Tshisekedi espérait mettre un terme aux violences perpétrées par les groupes armées dans cette partie de la RDC.
Un an et plus après, dans quel état se trouvent ces régions ?
En un an et plus, la situation s’est dégradée dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu. « Nous pensions que l’état de siège mettrait un terme aux « tracasseries », mais en fait c’est bien pire », déclara un responsable de la société civile, sous couvert d’anonymat. Il déplora qu’à présent, « les exactions militaires ont lieu à ciel ouvert et en toute impunité ».
Selon le baromètre de Kivu, le nombre de morts lors d’attaques a plus que doublé dans la région.
Pour sa part, Martin Fayulu, principal opposant de Félix Tshisekedi, estime que le régime instauré dans ces régions constitue une « souffrance atroce pour le peuple congolais ». Il préconise le déploiement d’une unité « tout au long de nos frontières à l’est du pays ».
Même son de cloche du côté de Me Jean Claude Katende, de l’Association africaine des droits de l’Homme. Selon lui, cet état de siège c’est « du gaspillage de fond public ».
Comment la population locale vit-elle la situation ?
Selon plusieurs témoignages, la population des provinces soumises à l’état de siège vivrait difficilement la situation. Leur quotien est rythmé par les volontés des militaires, qui possèdent le pouvoir. Plutôt que de résoudre les problèmes liés à la violence, la présence des militaires aurait aggravé la situation pour les habitants. Cependant, il y aurait aussi des tensions structurelles au sein de l’armée congolaise.
Philémon Kachelewa depuis Beni