Historique du succès
Le cycle des violences orchestrées par les groupes armés locaux et étrangers a souvent été à la base des mouvements de populations en zone de santé de Kamango dans le territoire de Beni au Nord-Kivu. Lors du déplacement, la population abandonne tout. Cette situation entraine le délabrement des infrastructures de base telles que les routes, les écoles, les structures de santé, les maisons et les ouvrages WASH. Pendant le retour, la vie reprend difficilement dans les villages à cause de l’accès difficile aux services sociaux de base dû au délabrement des infrastructures de base.
A partir de novembre 2021, grâce à une coopération régionale, le gouvernement congolais en collaboration avec le gouvernement ougandais ont mis en place des opérations militaires conjointes nommée SUJAA pour anéantir les groupes armés qui déstabilisent le territoire de Beni dont le plus dangereux est l’ Alliance Democratic Forces (ADF). Au stade actuel, il y a une bonne évolution de ces opérations car toutes les positions de l’ennemi qui étaient dans la zone de santé de Kamango ont été détruites et la population qui s’était déplacée est en train de s’installer dans les villages qui étaient autrefois occupés par les assaillants. Néanmoins, certains groupes résiduels sont en encore en errance dans les environs de la zone Kamango.
GGrâce u financement de l’Union Européenne (UE), pendant la période de Juin 2021 à Septembre 2023, Welthungerhilfe (WHH) a été à mesure de réhabiliter la route de desserte agricole NOBILI-KIKINGI, longue de 27 Kilomètres pour désenclaver la zone de retour où la population s’installe après les opérations de traque des ADF par la coalition militaire FARDC-UPDF.
La zone désenclavée est constituée principalement de cinq (5) aires de santé, notamment LUANOLI, NDAMA, KIKINGI, KIKURA et KAHONDO. Cette zone est peuplée d’environ 55.554 personnes retournées dont la principale activité est l’agriculture.
Avant sa réhabilitation, la route NOBILI-KIKINGI était dans un état de délabrement très avancé et difficilement praticable par véhicule et motos. A cause de cette situation, les paysans n’arrivaient pas à écouler facilement leurs produits agricoles vers le marché et une grande quantité de récolte se détériorait dans les champs faute de manque de voie d’évacuation.
Le prix des produits manufacturés au marché de KIKINGI était trop élevé car les opérateurs économiques n’avaient pas la possibilité de ravitailler facilement le marché à cause des mauvaises conditions de transport.
Sur le plan sanitaire, il s’observait un disfonctionnement dans le système de santé car c’était difficile de déplacer les malades lors du référencement vers l’hôpital générale de référence de Kamango et l’approvisionnement en médicaments était très difficile dans les structures médicales.
Sur le plan sécuritaire, les forces de l’ordre n’avaient pas de possibilité de se déployer rapidement dans la zone pour contenir les menaces d’attaque des ADF et autres assaillants.
L’accès humanitaire était quasiment impossible dans les aires de santé de KIKINGI et NDAMA.
Actuellement, pendant que les travaux de réhabilitation tendent vers la fin, l’espoir de vivre renait dans les aires de santé jadis enclavées car le trafic des camions, motos et piétons se fait en toute sureté et sécurité.
Les effets directs de la réhabilitation de la route NOBILI-KIKINGI sont visibles et les témoignages sont légion :
✓ Sur le plan économique et social, il se développe un grand marché à KIKINGI. Avant la réhabilitation de la route, chaque mardi de la semaine le marché à KIKINGI allait de 8h à 11h avec peu des gens pour effectuer les échanges commerciaux. Au stade actuel, le marché se tient chaque mardi de 8h à 17h avec la fréquentation des plusieurs personnes pour vendre et acheter des produits manufacturés et produits agricoles.
Le Président de la fédération des entreprises du Congo, FEC en témoigne en des termes précis.
« Nous commerçants et toute la population remercions l’ouverture de la route Nobili-Kikingi parce qu’à cause d’elle, le commerce est devenu fluide qu’autres fois. En cas d’une menace sécuritaire, l’intervention est désormais prompte. Le prix du taxis à déjà baissé. Avant, la course sur moto de Nobili à Kikingi était à 20.000FC mais maintenant nous ne payons que 5000FC pour la même course. L’effectif de ceux qui fréquentent le marché est déjà revu à la hausse, voir d’autres commerçants viennent désormais de l’Ouganda. Le marché ne se termine plus à 13 heures comme avant plutôt vers 17h30 », a révélé Monsieur Thembo Katiri Josaphat.
Suite à l’ouverture de cette route de desserte agricole par WHH, les sociétés commerciales impliquées dans la commercialisation du cacao ont ouvert des dépôts d’achat pour se rapprocher des producteurs. 1Kg de cacao qui se négociait à 2$ (inclus le cout de transport) à KIKINGI avant la réhabilitation de la route coûte actuellement 3,2$ (sans frais de transport). Le coût de transport sur moto a sensiblement baissé. En titre illustratif, le transport d’un sac de cacao de KIKINGI à NOBILI qui coûtait 30 dollars Américains se négocie actuellement entre 7 et 10 dollarsAméricains, tel le démontre Monsieur Kokodingo de la société Congo Cao rencontré sur son dépôt d’achat cacao.
« Cette route est très importante. Grâce à elle, nous avons été à même de rendre opérationnel un dépôt d’achat cacao ici. L’évacuation ne se fait plus sur moto mais par véhicule parce que la route est désormais accessible. Désormais le prix a tendance a galopé étant donné que le cacao est maintenant très recherché. Sommes reconnaissants à l’œuvre réalisée par WHH », précise-t-il.
Manutentionnaire de la société ESCO KIVU, le jeune garçon de moins de 30 ans, Monsieur Jackson Kambale ne cache pas aussi ses sentiments de satisfaction. Comme son collègue de Congo Cao, lui aussi salue à juste titre le travail de titan de WHH: « Depuis la réhabilitation de la route NOBILI-KIKINGI par WHH, le travail évolue bien par rapport aux jours passés. Désormais les véhicules arrivent facilement à Kikingi et l’évacuation du cacao ne pose plus problème. Notre dépôt n’avait jamais été opérationnel à Kikingi mais grâce à l’intervention de WHH, nous nous sommes déjà rapproché des cultivateurs. Actuellement, le prix du cacao a une tendance haussière étant donné que l’évacuation n’entraîne plus des coûts très élevés comme autre fois ».
Comme si cela ne suffisait pas, le prix pour la plus part des produits manufacturés a été revu en moitié car plusieurs commerçants ont la possibilité de ravitailler le marché. De l’autre côté, le prix des produits vivriers a triplé : en titre illustratif, un régime de banane qui coutait difficilement un (1) dollars Américains se négocie maintenant à trois (3) dollars. Grace à la réhabilitation de la route, le revenu des paysans tend à s’améliorer.
42 ans révolus, madame Kavira Mutengesa, productrice et vendeuse des tomates confirme cette hausse du prix des produits vivriers.
« La route réhabilitée par AAA (WHH) est de grande importance. Nous n’avions pas où amener nos récoltes vivrières pour la vente mais à ces jours, grâce à cette route, nous les acheminons à Nobili. Nos produits champêtres ne tardent plus parce que l’écoulement est devenu très facile. Aussi, grâce à la praticabilité de la route, le prix est déjà revu à la hausse. À WHH nous disons merci », a-t-elle remerciée.
✓ Sur le plan sanitaire, l’accès aux soins de santé s’améliore progressivement car en dépit de l’état de délabrement des bâtiments, les structures médicales ont la possibilité de se ravitailler facilement en médicament et effectuer le référencement des malades vers l’hôpital général de KAMANGO. Ce, sans beaucoup de peines grace à la praticabilité de la route. Au centre de santé de Kikingi où nous avons été, Monsieur Joseph Mathe Kawaya, Infirmier Titulaire parle d’une baisse du taux de mortalité.
« Actuellement, le travail évolue très normalement. Avant l’ouverture de cette route, nous mettions toute une journée pour arriver à Kamango ou Nobili afin de répondre aux invitations de notre hiérarchie. Mais actuellement, cela ne nous demande qu’un laps de temps. Aussi sur le plan professionnel, nous éprouvions des difficultés de référer les malades et par voie de conséquence, le taux de mortalité était élevé. Mais actuellement ce taux a sensiblement diminué. Nous réitérons nos remerciements à l’endroit de WHH », fait-il savoir.
✓ Sur le plan sécuritaire, les forces de l’ordre ont la facilité d’organiser de patrouilles pour protéger la population. En cas d’alerte sur la présence d’éventuelle groupe rebelle, les forces de l’ordre déploient facilement les troupes pour renforcer la protection des civils. La route réhabilitée favorise une certaine garantie sécuritaire dans la zone.
Une réalité confirmée par le Chef de localité de Kikingi: « La réhabilitation de cette route nous facilite désormais la libre circulation. Entre Kikingi et Nobili, il ne se pose plus de problème de transport. Désormais sommes confiants d’une bonne sécurité car l’intervention, en cas de nécessité, sera trop rapide. Nous disons grand merci à WHH car grâce à elle sommes sortis d’un enclavement total », a dit Hangi Wangoma Moïse.
✓ Sur le plan humanitaire, l’accès humanitaire est maintenant facile à partir de NOBILI. Avant, les ONG n’avaient pas la possibilité d’accéder à KIKINGI pour intervenir mais grace à la praticabilité de la route et l’amélioration de la sécurité, certains intervenants commencent à assister la population. SAVE THE CHILDREN intervient maintenant à KIKINGI, NDAMA, LUANOLI pour une assistance médicale.
✓ L’approche CASH FOR WORK (rémunération du travail) a permis de créer des emplois temporaires à plus ou moins 2710 personnes pour subvenir à leurs besoins. Les fonds perçus ont été affecté dans la construction des maisons, la mise en place de l’élevage, l’entrepreneuriat (petits commerces), le paiement des soins de santé, la scolarisation des enfants, l’achat des semences et autres biens ménager.
Jeune femme d’environ 30 ans, madame Masika Lajoie affirme avoir été à même de construire sa maison grâce au Cash Work de WHH: « L’argent gagné à partir du travail me confié par WHH m’a beaucoup aidé. Je n’avais pas de possibilité de me construire une maison mais aujourd’hui je viens d’y parvenir. Je ne souhaite vraiment pas être oublié dans un prochain projet de WHH », plaide-t-elle avant que Kambale Malembe Augustin rassure l’achat, suite au Cash Work, de ses deux chèvres, non seulement pour l’élevage mais aussi pour l’alimentation: « Ces chèvres, je les ai eu à partir du travail que WHH m’avait confié lors de la réhabilitation de la route Nobili-Kikingi. Ainsi je remercie l’ONG pour m’avoir employé comme cantonnier. À ce que je sache, l’élevage est d’une grande importance car il contribue à la bonne alimentation ».
27 ans d’âge, mademoiselle Kavira Musuvuri a investi son argent de Cash Work dans un petit commerce de vente des poissons:
« Je suis vendeuse des poissons. Ce commerce des poissons je l’ai entrepris grâce à la rémunération des travaux exécutés sur la route réhabilitée par AAA (WHH). Je remercie sincèrement l’ONG WHH ».
Pour assurer parfaitement l’essor socioéconomique de toute la zone de santé de KAMANGO, il est important de réhabiliter les autres routes d’importance capitale qui relient la zone au reste du territoire national, notamment la route NOBILI-KAMANGO-MBAU longue d’au moins 80 kilomètres et l’axe Mwenda-Kikingi long d’environ 30 Kilomètres.
En effet, le problème des infrastructures de tout bord se pose réellement avec acuité dans la zone de santé de Kamango. En dépit de la réhabilitation de la route NOBILI-KIKINGI par WHH, nombreux besoins restent ressentis par la population locale.
À l’issue de l’étude menée sur place à Kikingi, les personnes enquêtées ont, les unes, plaidé auprès de l’organisation bienfaitrice pour, non seulement la construction et/ou réhabilitation des infrastructures scolaires, sanitaires, du marché local, mais aussi pour leur équipement.
En revanche, d’autres ont souhaité l’intervention de WHH dans la sécurité alimentaire, la promotion de l’élevage, la réhabilitation d’autres routes de desserte agricole comme celles reliant Buisegha-Maale-Bovata, Kabolue-Ndiva-Mulopia et Nobili-Kamanzara-Kikura et l’électrification de la zone afin d’encourager la création des usines pour la transformation des produits champêtres en produits manufacturés.
Philémon Kachelewa